Malestroit de Jean de Saint-Chéron (Grasset)
Cet éplapourdissant récit de Jean de Saint-Cheron vient de sortir et j’avais hâte de pouvoir vous en parler. Je vous laisse consulter la quatrième de couverture pour avoir un aperçu de la vie vertigineuse de cette femme; le genre dont on se dit que si c’était un roman, on n’y croirait pas. D’ailleurs, même en essai, on n’y croit pas. Enfin si. Mais non ! Enfin… et le livre en rajoute à notre confusion en nous donnant des coups de coudes toutes les trois pages: « c’est fou, hein ? T’y crois pas, hein ?… T’es sûr…? »
Il faut dire que cette mystique du couvent breton de Malestroit, jamais canonisée car, selon l’Église, « trop de miracles », a accumulé stigmates, cœurs illuminés, visions, odeurs d’encens, apparitions de fleurs en plein hiver, bilocations (être en deux endroits à la fois, façon Hermione Granger, par exemple torturée par la Gestapo d’un côté et dans le métro de l’autre), etc.
« Elle a aussi fait léviter des hosties mais bon, je l’ai pas mis dans le livre », m’a expliqué Jean, cet être parcimonieux. Et comme y a pas que les miracles dans la vie, Yvonne Beauvais a aussi soigné et caché Juifs, résistants et combattants alliés, quitte à les déguiser quand les Allemands venaient voir ce que les sœurs traficotaient (je ne vous spoile pas cet épisode délicieusement de-Funèsque). Ce livre est drôle, passionné, hallucinant, et surtout pas « juste pour les cathos », qui pourraient d’ailleurs être réticents à ce déferlement baroque de magie et de mystique.
Elle s’appelle Beauvais, mais non, hélas elle n’est de ma famille, ce qui est dommage car collectionner les ancêtres bonnes sœurs mystiques est mon hobby. Mais sa parenté psychologique avec Marguerite-Marie Alacoque est évidente, et nos deux livres se ressemblent de multiples manières, alors si vous avez aimé Sainte Marguerite-Marie et moi, vous aimerez Yvonne Beauvais et Jean.
Clémentine Beauvais